Mis en ligne par Ignace de Witte le 12 octobre 2004
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La conduite d’une voiture de rallyes et celle d’une entreprise ont de nombreux points communs. Par exemple, il faut surveiller les informations qui s’affichent au tableau de bord, mais il faut surtout avoir l’œil sur ce qui se passe devant, loin devant, pour anticiper.
«Le marché automobile évolue sans cesse, explique Massoum DINDAR. À terme, il ne devrait plus y avoir à la Réunion que cinq ou six groupes et quelque monomarques. Mon objectif c’est d’être parmi les cinq ou six groupes, en étant multimarques». Il faudra donc compter avec lui dans les années qui viennent!
Pour rester dans le peloton de tête, DINDAR Autos, concessionnaire Opel depuis plus de 30 ans à La Réunion, a pris en main de nouvelles cartes: Kia en 1997, Fiat et Lancia en 1998 (Serca-Cadjee), Alfa-Roméo et Volvo en 1999. En 2002, DINDAR Autos a par contre préféré céder à Cotrans-Cadjee la carte Chrysler, pour les raisons techniques que nous explique Jean-Charles COTTO, directeur commercial: «Depuis le rachat de Chrysler par Daimler-Benz, les Chrysler comme par exemple le PT Cruiser ont un moteur Mercedes sous le capot; il était donc plus logique que la carte Chrysler revienne à celui qui distribue déjà Mercedes à la Réunion».
Opel faisant partie de General Motor, DINDAR Autos est évidemment leur interlocuteur privilégié à la Réunion pour les belles Américaines Chevrolet, Buick et Cadillac. Ce marché est insignifiant en terme de ventes (une Corvette ou une Cadillac de temps en temps) mais ce sont des marques de prestige pour lesquelles DINDAR Autos assure le SAV. Et puis, on ne sait jamais: «Au dernier salon de l’Automobile de Paris (2004), raconte Massoum DINDAR, j’ai été surpris de voir que General Motor Europe, qui assure la distribution de Daewoo en Europe, avait rebadgé certains modèles Chevrolet!».
Au fait, toutes ces marques n’entraînent-elles pas des difficultés, une auto-concurrence?
Massoum DINDAR: Les constructeurs automobiles développent aujourd’hui des plates-formes et des éléments mécaniques en commun, par exemple OPEL et FIAT ont mis au point et utilisent les mêmes moteurs diésel de 1.3 multijet et le 1.9 diesel common-rail de 120cv ,150cv sur plusieurs modèles de leur gamme. Dans la gamme utilitaires FIAT, PEUGEOT et CITROEN ont une gamme quasi-identique au niveau des plates-formes. La seule différence se situe au niveau mécanique avec des goupes propulseurs propriétaires à chaque marque. Un autre exemple OPEL fabrique le Trafic pour RENAULT. Ce dernier fabrique le Movano pour OPEL et NISSAN.
Et vis-à-vis des constructeurs, cela ne pose-t-il pas un problème, certains n’ont-ils pas des exigences d’exclusivité?
Massoum DINDAR: C’est fini ça, la réglementation européenne interdit maintenant les clauses d’exclusivité. Chaque marque impose simplement un cahier des charges, très précis, avec une surface de show-room minimum, des exigences de SAV, etc. Par exemple, il faut savoir que DINDAR Autos a un stock de pièces de rechanges qui comporte 20.000 références. Ce qui nous permet d’avoir un taux de Service é de 90%. Concrètement, cela veut dire que, dans 90% des cas, la pièce dont vous avez besoin est disponible sur le champ. Et si on ne l’a pas en rayon (10% des cas), avec cinq avions par jour qui desservent la Réunion, elle est là sous 48h à 72h.
Voici donc un deuxième point commun entre l’entreprise et le rallye: pour gagner, il faut une stratégie mais surtout une bonne logistique. À ce propos, il convient de signaler que DINDAR Autos et Air Bourbon ont signé un accord de partenariat, et pas seulement pour la livraison de pièces détachées. Ce sont deux entreprises qui ont en commun d’être à capitaux 100% réunionnais et qui partagent une même passion pour le sport automobile, ne serait-ce qu’en la personne d’Alain ALBANY, cadre chez Air Bourbon et organisateur du Tour Auto, ou Valérie GANGNANT, copilote d’Olivier PAYET et hôtesse de l’air (Air Bourbon).
Mais n’y a-t-il pas des quotas de vente? On en a parlé dans la presse il n’y a pas longtemps, en avançant même le chiffre de 900 voitures.
Massoum DINDAR: Je vois à quoi vous faites allusion! La vérité c’est que, comme toute entreprise, DINDAR Autos doit établir en début d’année un prévisionnel de ventes, qui tient compte des capacités du marché local mais aussi de la disponibilité des véhicules chez nos fournisseurs. En Opel, notre objectif 2004 est de 985 unités. 985 voitures, c’est le volume minimun à partir duquel Opel nous intéresse à des primes volume. Pour Kia, les difficultés sont du passé, KIA fait partie du groupe HUYNDAÏ, maintenant avec le renouvellement de toute la gamme et d’une nouvelle usine en Espagne,du succès des KIA en EUROPE avec le SORENTO, CARNIVAL, CARENS et bientôt le SPORTAGE, il n’y aura plus de problème de disponibilité, DINDAR AUTOMOBILES pourra satisfaire la demande du maché reunionnais.
Toujours dans la perspective de figurer parmi les cinq ou six groupes qui seront encore là dans quelques années, DINDAR Autos a choisi un emplacement stratégique: à la sortie Est de St-Denis, l’endroit que les dionysiens appellent «carrefour UMAB», en référence à l’ancien occupant des lieux. Les bâtiments actuels sont surmontés d’une enseigne FIAT . Mais dans quelques années, ce qui va frapper, ce sont les 17 étages des nouvelles installations. En effet, en partenariat avec un promoteur immobilier, DINDAR Autos va construire sur cet emplacement symbolique (de la rue Lory-les-Bas au Bd Léopold Rambaud) un vaste complexe immobilier, comprenant la concession au rez-de-chaussée et un demi millier de logements au dessus, répartis entre quatre tours culminant à R+17! Quand on connaît les difficultés des Dionysiens pour trouver un logement, ce demi millier d’appartements qui seront bientôt disponibles aux portes de la ville, c’est une excellente nouvelle.
Le rallye est le meilleur moyen pour une marque automobile de se rapprocher du public et de se forger une bonne image de marque. Massoum le reconnaît: «Peugeot, Renault, Ford, Toyota et Citroën investissent dans la compétition et ils ont de bons résultats au niveau des ventes.» Il nous livre d’ailleurs un scoop: il faudra compter avec lui la saison prochaine ! En effet, cette année, DINDAR Autos a confié le volant d’une Opel Corsa super 1600 à Olivier PAYET et Valérie GANGNANT. L’année prochaine, ils se verront confier une nouvelle voiture.
DINDAR Autos va se rapprocher du public par le biais du sport automobile mais va également s’en rapprocher physiquement. Déjà présent à St-Denis et St-Pierre, DINDAR Autos va renforcer sa présence dans l’Ouest et l’Est du département. À St-Paul, DINDAR Autos dispose d’un site de quelque 10.000m2 sur la zone de Cambaie. L’endroit n’est peut-être pas visible depuis la RN1, comme la concurrence, mais c’est le secteur de St-Paul qui a le plus fort potentiel de développement: la municipalité d’Alain Bénard l’a choisi pour ses ambitieux projets de marina, d’hippodrome, de cinéma multiplexe, etc. Dans l’Est, DINDAR Autos est présent à St-André, via Muti-Marques Autos et D.L. Automobiles , et St-Benoît, en cours de nomination.
Investissements dans les infrastructures, image sportive automobile, tous ces efforts seraient vains si, de leur côté, les constructeurs ne faisaient pas eux aussi des efforts. Il y a dix ans, Opel était une marque qui avait le vent en poupe: la Manta 400 était toujours une référence en rallyes (aux mains de Massoum mais aussi Ricquebourg, Chaussalet, etc.), la Calibra était le plus beau coupé du moment et la petite Corsa offrait un des meilleurs rapports qualité-prix. Opel était alors la 1ère marque étrangère vendue dans l’île. Jean-Charles COTTO se rappelle qu’en 1996, la Corsa a même été la voiture la plus vendue à la Réunion, permettant à DINDAR Autos d’atteindre 2000 unités.
Mais par la suite, la marque Opel s’est reposée sur ses lauriers, ne renouvelant pas suffisamment sa gamme, et a perdu des parts de marché, tant en métropole qu’à la Réunion. C’est semble-t-il à cette époque que DINDAR Autos a compris l’intérêt d’avoir plusieurs cordes à son arc et a commencé à acquérir de nouvelles cartes.
En dix ans, le marché automobile réunionnais a complètement changé. «Il y a dix ans, les voitures étaient vendues à la Réunion jusqu’à 25% à 30 % plus chères qu’en métropole…» C’est Jean-Charles COTTO, directeur commercial de DINDAR Autos, qui parle. Et de poursuivre: «Mais maintenant, ce serait plus aux alentours de 15-20%». Ce qui a fait baisser le prix des voitures, c’est la concurrence de plus en plus acharnée que se livrent les concessionnaires. On passe d’un marché d’équipement des ménages à un marché de renouvellement. Autrement dit, maintenant, quand on vend une voiture neuve à un client, on doit presque automatiquement lui reprendre son ancien véhicule. Cela fait deux négociations. Autre phénomène, 99,99% des voitures sont vendues à crédit, très souvent sur 48, voire 60 mois, et avec une telle durée de crédit il n’est pas rare que l’automobiliste change de véhicule avant même la fin du crédit. Le jeu ne consiste plus à vendre au client une voiture mais un véhicule ET un financement.
Selon Jean-Charles COTTO, le consommateur réunionnais est aussi de mieux en mieux informé et de plus en plus exigeant et sérieux dans ses choix. Il semble que le «rapport qualité/prix» soit devenu son leitmotiv. Pour la qualité, DINDAR Autos peut compter sur la réputation de solidité des Opel «made in Germany». Pour le prix, DINDAR Autos fait comme tout le monde: remise, reprise, financement, etc. Mais en novembre 2002, DINDAR Autos a vraiment fait très fort, en lançant une opération commerciale sans précédent à la Réunion: des voitures neuves vendues ici au même prix qu’en métropole ! Jean-Charles COTTO l’avoue: DINDAR Autos rogne sur sa marge habituelle pour y parvenir.
L’opération a séduit le public et elle a été renouvelée en janvier 2003 et en février et mars 2004. Et elle le sera encore, n’en déplaise à la concurrence!
Mais pourquoi n’est-ce pas possible toute l’année, sur toutes les marques importées par DINDAR Autos et sur l’ensemble de la gamme?
Jean-Charles COTTO: Ce n’est malheureusement pas possible… Tout d’abord, en métropole, les concessionnaires bénéficient des campagnes publicitaires qui sont organisées au niveau national par les constructeurs. Nous, ici, tous les frais de publicité sont à notre charge. Cela représente quelque-chose comme 7% du prix de vente d’une voiture neuve, contre 1% pour un concessionnaire en métropole. Ensuite, il y a l’Octroi de Mer: 28% sur une voiture de plus de 2 litres de cylindrée, qu’elle soit essence ou diesel. Sans oublier le coût du stockage. Les opérations prix métropole sont une bonne opération commerciale, cela permet de booster les ventes, mais ce n’est malheureusement pas possible toute l’année.
Après vérification, les constructeurs automobiles figurent effectivement sur la liste des plus gros annonceurs publicitaires de France (métropolitaine). Par exemple, Peugeot, Renault et Citroën ont investi au total 495 millions d’euros dans la publicité en 2003 et 588 millions d’euros en 2002 (source SECODIP/AACC). Cela fait 1,5 million d’euros par jour de publicité qui, en France métropolitaine, sont assurés par ces trois constructeurs. Ramené au nombre de véhicule vendus, cela fait entre 400 et 450 € . Autre fait vérifié: les voitures vendues à la Réunion sont effectivement frappées (le mot est faible) d’Octroi de Mer, en fonction de leur cylindrée: 12%, 17%, 22% et jusqu’à 28% (+2 litres), auquel s’ajoute encore 1% de «taxe additionnelle à l’octroi de mer» et 8,5% de TVA. Même au taux d’OM le plus faible, la fiscalité est donc plus forte ici qu’en métropole: 12%+1%+8,5%= 21,5% alors qu’en métropole, les véhicules ne sont soumis qu’à une TVA de 19,60%, et cela quelle que soit leur cylindrée.
L’occasion de rappeler que, dans le cas des voitures en tous cas, l’octroi de mer est bien «une taxe pour taxer», qui ne protège absolument aucun constructeur local. Les voitures vont donc rester plus chères à la Réunion qu’en métropole encore un bon bout de temps, ce qui ne donne que plus d’intérêt aux opérations «prix métropole» de DINDAR Autos.
General Motor, General Motor Europe et General Motor France sont des poupées russes. La première, GM, est née en 1908. C’est le 1er constructeur automobile mondial, avec 8.595.000 véhicules vendus en 2003, soit 14,7% du marché mondial. Parmi les marques emblématiques de GM, il y a Chevrolet, Cadillac, Buick, etc.
La seconde poupée russe, c’est GM Europe, qui a débarqué sur le «vieux continent» en 1923. GM Europe a pris le contrôle de Vauxhall en 1925 et celui d’Opel en 1929, les AmÉricains ayant très vite compris que ces deux marques avaient des modèles mieux adaptés au marché européen que leurs Chevrolet, Buick, Pontiac et autres Cadillac! En 1989, GM Europe a pris 50% de Saab, puis 100% en 2000. GM Europe contrôle en outre la diffusion des Coréennes Daewoo sur le sol européen, ainsi que celle, plus confidentielle il est vrai, des Hummer. Au total, avec 1.783.300 véhicules vendus, GM Europe détient 10% du marché européen. Ce sont bien évidemment les Opel et Vauxhall (modèles identiques mais avec volant à droite pour le marché anglais) qui forment le gros de la troupe, avec 1.568.500 unités, contre seulement 74.500 Saab, 132.300 Daewoo et 8000 Chevrolet, Cadillac, Hummer.
Troisième poupée russe, G.M. France, qui détient 6,4% du marché hexagonal avec 128.300 véhicules vendus, dont 120.700 Opel, 4.400 Daewoo, 2.900 Saab et 300 Chevrolet, Cadillac et (?) Hummer.
Et la Réunion dans tout ça? L’an dernier (2003) il s’est vendu 28.169 véhicules neufs dans l’île. Si DINDAR Autos veut s’aligner sur GM France (6,4% du marché national), cela voudrait dire qu’il lui faudrait vendre 1800 véhicules par an, dont 1700 Opel. Ce chiffre a déjà été atteint, par le passé, à la faveur d’une conjoncture particulièrement favorable. Aujourd’hui, DINDAR Autos vend 985 Opel par an (objectif 2004). Les moyens d’une politique ambitieuse de (re)conquête de parts de marché sont en train d’être mis en place et, comme ces efforts coïncident avec le renouvellement des gammes Opel , Kia et Fiat Alfa que le marché réunionnais est toujours porteur (12.000 nouveaux permis de conduire décernés chaque année), tous les espoirs sont permis de voir DINDAR Autos figurer effectivement parmi les cinq ou six groupe dans quelques années à venir.
Elle est née dans les allées du dernier salon de l’auto de Saint-Denis (novembre 2003), et la presse locale s’en étant fait l’écho, elle a pris de l’ampleur: DINDAR Autos allait perdre la carte Opel au profit de CMM Automobiles, importateur à la Réunion de la marque Ford! Ce qui s’appelle un méchant coup de griffe entre l’importateur de la Puma et celui de la Tigra! Pour tuer une rumeur, il n’existe qu’une seule arme efficace: l’information vérifiée. General Motor, dont Opel est une des marques, a apporté un démenti formel à la rumeur, précisant que CMM avait bien fait une demande pour la Réunion, ce qui est son droit le plus strict, mais General Motor France, qui travaille depuis 30 ans avec DINDAR Autos, n’a pas donné suite à cette demande. Mais a revu à la hausse ses objectifs de vente, histoire de lui mettre la pression !